Dans les Amours pour Cassandre de Ronsard, la forme d`etre de l`amour est la souffrance qui reapparait a chaque instant. Y retentissent des appels a la mort du poete, blesse par les beaux yeux, mais cruels, de sa Dame avec laquelle il desire se reconcilier. Cependant la mort souhaitee par lui ne serait etre assimilee avec la mort naturelle avec laquelle la souffrance cessera a jamais d`exister. Si le poete desire la mort, ce n`est plus pour echapper a son impuissance humaine et a son destin malheureux que pour surmonter la souffrance amoureuse par la mort, a savoir pour transformer la premiere en poussoire de son desir de chanter. Consideree de ce point de vue, la mort acquiert une nouvelle fonction : elle est douce comme l`amour reve et elle est contradictoire comme sa Dame muable et instable. Cette nouvelle fonction de la mort met en question le statut de sa Dame qui a domine le poete jusqu`ici en le petrifiant. La Dame devient l`objet de l`ecriture du desir amoureux : l`anaphore et la repetition des expressions employees nombreuses fois expriment le desir a la nouvelle mort a laquelle le poete assigne une qualite cyclique. Se trouvant dans le temps suivant la loi de la nature, la mort recupere sans cesse la force de la vie a chaque instant de l`appel de l`amoureux. Elle devient egalement par les enjeux de l`ecriture la specificite refletant l`identite du poete dont la fonction reside dans l`activite d`imprimer le souvenir de la beaute de la Dame qui l`a fait souffrir en lui donnant tout en meme temps le plaisir. Plus la mort se retablit en echappant au temps naturel, plus le poete entreprend des tentatives pour surmonter son destin menace de silence, qui risque de le deposseder de sa voix en lui empechant le souvenir de son amour, matiere de son chant. La reclamation a la voix qu`on trouve dans la poesie amoureuse serait la revendication au droit a la parole qui peut composer dans le temps cyclique l`univers amoureux, le sujet de sa memoire et qui peut faire vivre et revivre le poete. La souffrance de la mort se confond ainsi avec le plaisir d`ecrire dans le combat amoureux. Face a la mort naturelle, le poete cherche la mort esthetique grace a laquelle l`amour devient la scene de l`ecriture.