On voit apparai^tre la litte´rature de la folie au de´but du 16^e sie`cle avec la Nef des fous. Cela prend l`allure d`une satire morale, et on prend soin de l`e´carter. Les figures de la vision cosmique et les mouvements de la re´flexdion morale vont ensemble en se se´parant toujours davantage pour prendre des relations re´ciproques. D`un co^te´ il y a une Nef des fous, charge´e de visages forcene´s, qui peu a` peu s`enfonce dans la nuit du monde, de l`autre, une Nef des fous qui forme les images des sages exemplaires. Pour Erasme et toute la tradition humaniste, la folie est prise dans l`univers du discours moral. La litte´rature du 16e sie`cle voit surtout la folie relative a` la raison. La folie entre dans une relation perpe´tuelle avec la raison. Ils se jugent et se mesurent dans le mouvement de re´fe´rence re´sciproque. Vers la fin du sie`cle, quatre formes de relation sont e´tablies. "La folie par identification romanesque", fixe´e par Cervantes, propose les chime`res transfe´re´es entre l`e´crivain et le lecteur. La fantaisie d`un co^te´ devient fantasme par la ruse de l`e´crivain. "La folie de vaine pre´somption" voit un fou qui s`identifie a` l`autre moi par une adhe´sion imaginaire. Il se permet toutes les qualite´s, toutes les vertus ou puissances dont il est de´pourvu. "La folie du juste cha^timent", dans l`ordre moral, punit les de´sordres du coeur pour de´voiler la ve´rite´. "La folie de la passion de´sespe´re´e", allure de l`amour de´c¿u dans son exce`s, surtout l`amour trompe´ par la fatalite´ du destin, a la mort comme sa fin tragique. Laisse´ seul de l`amour fini, le fou se laisse dans le vide du de´lire. Cha^timent d`une passion trop violente, la folie entre dans une absence irre´parable. Michel Foucault admire la folie de Cervantes ou de Shakespeare. Pour lui, ils placent la folie toujours dans une espace extre^me sans recours. Ni la ve´rite´ ni la raison ne la rame`ne dans le monde du soleil. C`est une ple´nitude de la mort. La Folie de Foucault ira vers une folie tragique. e´carte´e, menace´e au silence.