Nous avons commence notre recherche a partir de la theorie de Kristeva qui accorde beaucoup d`importance au pre-oedipe, c`est a dire a ce lien de l`enfant particulierment tenace et fort a la mere, de sorte que nous puissions analyser les fantasmes autour de la relation mere/fils chez Albert Camus. Dans L`Etranger dont la narration est declenchee par “Aujourd`hui maman est morte”, nous assistons au retour a la chora, espace semiotique pre-verbal selon Kristeva. Comme Meursault nie la realite de la mort de sa mere, il n`arrive pas a faire son deuil, il reste donc insensible et indifferent a sa mort. Il est en etat de melancolie et cela le conduit finalement a l`auto-destruction, au meurtre de l`Arabe. Dans Entre oui et non, notre auteur raconte le retour a son pays natal ou il se souvient d`≪un etrange sentiment≫. Celui-ci est un sentiment qu`on eprouve lorsque se revele une etrangete cachee dans ce qu`on croit familier. Freud l`a nomme ≪Unheimlich≫, le contraire de ≪heimlich≫, et cet etrange sentiment est lie a la memoire inconsciente de la matrice, le corps maternel. Dans Entre oui et non, Camus decrit ce corps maternel expose a la violence comme ≪Unheimlich≫. Dans l`imaginaire de Camus, le corps maternel brutalise fonctionne comme l`abject qui menace toutes les limites permettant de construire son moi. L`odeur melee de sueur et de vinaigre associee a la mere agressee lui provoque un degout et une nausee. Elle represente alors l`abjection qu`il doit expulser de son moi. Comme l`obsession de la femme noyee ne quitte jamais Clamence, protagoniste de La Chute, il s`installe a Amsterdam, ville de canaux. Cet espace se caracterise par l`effacement total des limites spatiales qui represente metaphoriquement le chaos psychique, le narcissisme infantile de Clamence. L`abject y est cette femme noyee qu`il a refuse de sauver. Donc l`abjection a faire pour Clamence est de s`expulser du narcissisme, c`est-a-dire de reconnaitre et sauver l`autre. Nous avons donne une extension au ≪roman familial≫ defini comme un fantasme pour s`evader de l`oppression familiale de maniere a l`appliquer a la relation mere/fils dans Le Premier homme. Dans sa premiere partie dont le titre est ≪recherche du pere≫, il finit par constater qu`il est sans pere, sans patrie, sans histoire, tandis que sa mere omnipresente. On y assite a l`evolution de la mere dont le silence animal devant lequel son fils avait du mal a pleurer devient un silence plus puissant que des miliers de mots. La mere camusienne y est la mere exceptionnelle qui, malgre son infirmite et le denuement, reussit a communiquer dans son admirable silence un amour d`une grande profondeur.