Voltaire, qui partit pour l``Angleterre en poete, en revint en philosophe. Et ses Lettres philosophiques en sont la preuve. En Angleterre, Voltaire assistait a la liberte d``esprit et a la raison triomphante. Etonne de la liberte de conscience dont jouissaient les pratiquants de diverses sectes de la religion revelee, il ne pouvait se retenir de la comparer a la tyrannie du catholicisme francais. La mise en contraste de la realite politique de l``Angleterre avec celle de la France vient naturellement pour critiquer le gouvernement francais ainsi que pour mettre en relief une liberte sage acquise par le parlement anglais. Quand il s``agit des belles-lettres, Voltaire se livre a un sentiment de superiorite en faveur de la litterature francaise. Cependant il envie les hommes de lettres anglais de ce qu``ils jouissent de consideration generale. En tant que poete, Voltaire, toujours conscient de son etat, ne pouvait se dispenser de comparer leur condition a la sienne. Mais ce qui frappe le plus son esprit, c``est Newton et Locke. Fascine par des theories de Newton, Voltaire voit un sage en lui et un re.veur en Descartes. C``est donc un ``philosophe`` que Voltaire trouve en Newton. Car ce siecle de science confond les savants avec les philosophes. Pour Voltaire qui "parle selon les lumieres de la philosophie", la philosophie "consiste a s``arre.ter quand le flambeau de la physique nous manque". D``autre part, Locke lui parai.t le philosophe le plus sage, le plus methodique et le plus exact. Les theories de ces deux savants anglais s``emparent tellement de l``esprit de Voltaire que celui-ci vient a les appliquer me.me aux Pensees de Pascal. Desormais ce ``misanthrope sublime`` reste l``adversaire privilegie pour Voltaire qui pretend ne parler qu``en philosophe. Au siecle de Voltaire,le mot ``philosophe`` entend donc un homme cultive qui, hostile aux religions revelees, se sert de sa raison (``la raison humaine``) et juge de toutes choses avec liberte entiere. Les Lettres philosophiques en font etat.