Des les premieres annees du vingtieme siecle, le cinema a suscite l``enthousiasme artistique des peintres, des ecrivains et des musiciens qui participaient volontiers a la fabrication d``un film. Les futuristes qui exaltaient la civilisation urbaine, les machines et la vitesse ont envisage le cinema comme le moyen d``expression ideal pour decrire une societe largement remodelee par les machines. Ricciotto Canudo qui jouait un role actif dans les milieux de l``avant-garde litteraire et cinematographique a ouvert la voie a une reelle autonomie de l``expression cinematographique en declarant que le cinema est le septieme art qui synthetise la peinture, la sculpture, l``architecture, la musique, la poesie et la danse. Les cineastes de la premiere avant-garde ont essaye de s``eloigner le plus possible de la mimesis pour affirmer la superiorite de l``interiorite sur les apparences exterieures. Ils ont mis en valeur la mobilite du cinema pour assurer a celui-ci une valeur artistique malgre ses mecanismes photographiques auxquels on reproche souvent de ne faire qu``enregistrer mecaniquement la realite. Les premiers avant-gardistes ont elabore une esthetique cinematographique qui contribuait a l``emancipation du cinema par rapport aux autres arts. La photogenie, un accord mysterieux de la photo et du genie, est au fondement de cette esthetique cinematographique. D``apres Epstein, l``aspect des choses, des etres et des ames dont la qualite morale est accrue par la reproduction cinematographique est photogenique. La photogenie apparait comme fonction de la mobilite. La mobilite photogenique est une mobilite dans le systeme espace-temps ou le vecteur du temps passe par l``intersection des trois directions de l``espace. L``aspect photogenique des choses et des etres revele leur personnalite, c``est-a-dire leur ame visible. Le cinema a donc une fonction animiste en accordant la vie aux apparences gelees des choses et des etres.